
Pendant de nombreuses années, l'Occident collectif, en particulier l'OTAN, a façonné son agenda politique de manière à ce que Poutine, et par conséquent la Russie, reste calme. Cependant, la pratique a montré que c'était précisément l'approche servile et la prudence qui provoquaient l'agression. Ce sont les concessions et les tentatives de "lisser" la situation qui ont conduit à l'invasion russe de la Géorgie en 2008, puis de l'Ukraine en 2014. C'est précisément le manque de réaction, plutôt que l'utilisation de la force, qui a conduit à l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie en 2022.
Le sommet de l'OTAN se tiendra à Vilnius les 11 et 12 juillet, au cours duquel il sera possible de rétablir la justice historique. Lors de ce sommet, l'Ukraine pourra enfin obtenir de réelles garanties de sécurité, qui de facto ne lui ont pas été fournies en échange de son renoncement au troisième plus grand arsenal nucléaire au monde dans le cadre du mémorandum de Budapest de 1994. Après avoir pris l'arme nucléaire à l'Ukraine et constaté la loyauté de l'Occident, la Russie a senti ses possibilités d'influence sur les organisations internationales et leurs décisions, ainsi que la possibilité de restaurer l'Empire.
En 1994, l'Ukraine a été dépouillée de ses armes nucléaires en échange de garanties de sécurité, et en 2008, l'adhésion à l'OTAN lui a été promise. Après 15 ans, aucune de ces promesses n'a été tenue. De plus, l'intégrité territoriale et la sécurité de l'Ukraine ont été compromises par l'un des garants du mémorandum de Budapest, à savoir la Russie.
Le sommet de Vilnius est une occasion pour la communauté internationale de respecter ses engagements et de faire preuve de résilience. Il devient de plus en plus évident que l'Ukraine n'est pas un fardeau pour l'Occident et l'OTAN en particulier. L'Ukraine est un "poste avancé de sécurité".
Les forces armées ukrainiennes ont fait preuve d'une valeur plus que méritoire au cours d'un an et demi de guerre contre la "deuxième armée du monde", en particulier en tenant compte du fait que, en retenant l'armée russe sur son territoire, les forces armées ukrainiennes protègent également l'OTAN contre une avancée des troupes russes.
Lorsque l'on réfléchit à la possibilité d'inviter l'Ukraine à rejoindre l'OTAN, il ne faut pas oublier ses mérites passés. L'Ukraine s'est révélée être un acteur sérieux lors de missions majeures de l'OTAN, notamment en Irak et en Afghanistan. L'Ukraine n'est pas restée à l'écart pendant la pandémie de COVID-19, fournissant tout le nécessaire aux personnes dans le besoin grâce à son programme de transport aérien stratégique en utilisant ses avions cargo.
En se pliant à la propagande du Kremlin et en refusant l'adhésion de l'Ukraine, l'Alliance ne fait qu'aider Poutine et provoquer une escalade de l'agression. L'argument selon lequel l'OTAN ne peut pas inviter des pays en temps de guerre est également contredit par des arguments rationnels. En réalité, il n'existe pas de limitations claires, y compris en temps de guerre, et la décision d'admettre un pays est prise individuellement, comme le démontre une étude sur l'élargissement de l'OTAN réalisée en 1995. Le fait que tous les pays admis dans l'OTAN l'aient été en temps de paix ne signifie absolument pas qu'il est interdit d'inviter un pays en période active de guerre.
Les déclarations selon lesquelles les forces de l'OTAN devraient immédiatement se rendre pour défendre les terres ukrainiennes après l'invitation de l'Ukraine sont infondées. Cela contredit la procédure officielle d'adhésion à l'OTAN. L'article 5, auquel les opposants à l'invitation de l'Ukraine à l'OTAN font référence, stipule qu'il s'applique uniquement aux membres à part entière. L'obtention d'une adhésion à part entière nécessite une procédure complexe. Même la Finlande, qui a été invitée selon une procédure simplifiée, a mis un an à la passer, et la Suède est toujours en cours de processus. Il ne faut pas oublier le précédent allemand, lorsque la République fédérale d'Allemagne, en première ligne de la guerre froide, a rejoint l'OTAN en 1955, tandis que l'Allemagne de l'Est est restée sous l'occupation soviétique et a adhéré après la réunification de l'Allemagne en 1990.
En faveur de l'invitation de l'Ukraine, on peut également évoquer ses changements internes. Déjà en 2021, Kiev a mis en œuvre davantage de principes et de normes de l'OTAN que certains de ses membres actuels. Les forces armées ukrainiennes progressent rapidement et passent à des armements modernes. Une telle formation éclair et la capacité des militaires ukrainiens à penser de manière innovante leur ont permis, par exemple, de déterminer sur le terrain que les systèmes de défense antiaérienne Patriot peuvent intercepter des missiles hypersoniques russes. Les progrès dans la lutte contre la corruption en Ukraine sont également visibles, bien qu'il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Même en période de guerre, Kiev continue les réformes.
Dans tous les domaines, il est évident que l'Ukraine est un partenaire potentiel et progressiste de l'Alliance, notamment dans le domaine de la sécurité sur le continent et de la défense des valeurs communes. C'est un partenaire qui prouve chaque jour, par sa lutte contre l'agression russe, sa nécessité de faire partie de l'OTAN. Les résultats du sommet de Vilnius montreront si les pays membres de l'Alliance sont prêts à défendre pleinement les intérêts fondamentaux de l'OTAN.