À l’issue d’une tournée de deux semaines au Canada pour enquêter sur les conditions de vie et de travail des “travailleurs étrangers temporaires”, le rapporteur spécial des Nations unies a livré son verdict mercredi 6 septembre. Tomoya Obokata déplore “un terreau pour des formes d’esclavage moderne”.

Des milliers de travailleurs entrent au Canada chaque année en vertu du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Ils sont si nombreux, indique CBC, que “Statistique Canada estime qu’ils représentent 15 % de la main-d’œuvre” du pays. Pour la seule année 2022, ajoute The Globe and Mail, des employeurs ont été autorisés à pourvoir 220 000 postes dans le cadre de ce programme.
Mais les conditions de vie de ces travailleurs sont déplorables, affirme le rapporteur spécial de l’ONU sur les formes contemporaines d’esclavage, Tomoya Obokata. Des personnes employées au Québec, en Ontario, en Colombie-Britannique et au Nouveau-Brunswick, résume La Presse, lui ont confié être parfois entassées dans des logements insalubres. Ils “ont parlé des ‘heures de travail excessives’, des ‘faibles salaires’, des ‘heures de travail supplémentaires non rémunérées’”. Certains ont même évoqué “‘du harcèlement sexuel, de l’intimidation et de la violence’ subis aux mains d’employeurs ou de leur famille”.
La résidence permanente, la solution ?
Rappelant que cette main-d’œuvre joue un rôle vital dans l’économie canadienne, Tomoya Obokata juge en outre “discriminatoire” le fait que ces salariés aient difficilement ou pas du tout accès à la résidence permanente. Syed Hussan, de Migrant Workers Alliance for Change, abonde auprès de CBC : “Il répète et il dit ce que nous disons depuis longtemps… Les travailleurs migrants dans ce pays sont exploités et [l’obtention du] statut de résident permanent est la première solution pour leur garantir l’égalité des droits.”
La sénatrice indépendante Julie Miville-Dechêne souscrit elle aussi aux conclusions de l’expert onusien. Parce que ces travailleurs n’ont droit qu’à des “permis de travail fermés”, qui les lient à un seul employeur, regrette-t-elle auprès du quotidien francophone, “il y a un risque d’esclavage moderne. […] Cela donne des armes à certains patrons peu scrupuleux pour exploiter et menacer leur personnel.” Elle préconise la délivrance de permis ouverts, qui leur permettraient de changer d’entreprise :
“Pourquoi, nous, on aurait le droit de changer, et pas eux ? Ils paient des impôts et ils n’ont pas les mêmes droits.”
Source: Courrier international